L'histoire du Fourneau de Brest, inauguré en 1994 et labellisé Centre National des Arts de la Rue (CNAR) en 2005 par le Ministère de la Culture, trouve sa source à la fin des années 70, au sein d'une association, le Patronage Laïque du Relecq-Kerhuon, près de Brest. Cette commune, comme ses voisines de l'agglomération, est peu active d'un point de vue culturel, souffrant de sa trop grande proximité avec Brest. A cette époque, le PLRK vivote, disposant de peu de moyens financiers pour animer la commune. Cependant, un groupe de jeunes, majoritairement enseignants et emplis d’énergie est décidé à faire bouger les choses en intégrant le Conseil d'Administration de l'association. Ils mettent en œuvre toutes sortes d'idées pour rendre la ville agréable en matière de services et de loisirs.
A la fin des années 70, la conjoncture politique locale est favorable à l'action sociale et culturelle et dès 1982, l'équipe du PLRK souhaite se démarquer de cette tradition de grandes kermesses en créant un événement plus ambitieux, correspondant véritablement à ses attentes. Le PLRK organise alors au printemps une grande rencontre d'artisanat d'art très originale pour l'époque, appelée La Tête et les Mains. Le principe consiste à accueillir des artisans qui devront démontrer leurs talents tout au long de la journée. La notion de performance et de spectacle vivant est donc déjà importante, un prix récompensant l'artisan le plus coté par le public.
Cette fête remporte un franc succès, passant de 1500 visiteurs en 1982 à 35000 cinq ans après. Les artisans viennent de toute la France et l'équipe procède d'ailleurs à une sélection afin de proposer chaque année environ 80 stands variés et de qualité.
En 1983, les organisateurs suivent déjà d'une œil passionné ce qui se passe en France dans le domaine des Arts de la Rue. Ils ont notamment découvert la compagnie Royale de Luxe et ses interventions dans l'espace urbain. L'équipe comprend rapidement que ce qui correspond le plus à son état d'esprit se trouve dans cette forme d'expression artistique. La Tête et les Mains s'ouvre alors aux compagnies d'arts de la rue, donnant à la manifestation une ambiance plus festive. On voit apparaître, entre les stands d'artisans, des jongleurs, des cracheurs de feu, des clowns et des marionnettistes dont le nombre croît d'années en années. En 1987, la fête accueille cinquante mille visiteurs et se diversifie de plus en plus. Installée sur un terrain de camping, la manifestation accueille un espace cinéma et le vieux port abrite de vieux gréements kerhorres. Les écoles du Relecq-Kerhuon sont associées au projet. Parmi les compagnies participant à l'évènement, il y a notamment Les Noctambules, le Théâtre de l'Eclair et ses marionnettes, le cirque français Kisling ou Charli Encor.
En 1988, lors de la 7e édition, l'équipe de La Tête et les Mains rencontre la compagnie Oposito, ce qui marquera un tournant essentiel dans son engagement aux côtés des arts de la rue. Elle nouera par la suite des liens très forts avec cette compagnie pionnière, déterminants pour la suite du festival et de ses co-organisateurs. De plus, le concept de la fête ne séduit plus l'équipe de la Tête et les Mains, voyant celle-ci comme une manifestation lourde à organiser, avec un public plutôt passif et des artisans de plus en plus exigeants. Au gré des rencontres avec Oposito, elle établit alors une stratégie de communication à travers une série de spectacles vivants, se déroulant en amont et pendant la fête.
Durant cette édition qui se démarque davantage des précédentes, la compagnie Oposito présente son spectacle La Rumeur en amont du festival. Il vise à promouvoir l'évènement au moyen de la « rumeur ». Ainsi, pendant les deux jours précédant l'inauguration de cette édition, cinq comédiens équipés de motos et huit comédiens piétons (les Schteumits) sillonnent les lieux publics de Brest aux heures d'affluence et annoncent à leur façon ce qui se trame au Relecq-Kerhuon. Réalisant des parades, des minis spectacles, des interventions spectaculaires et insolites, la troupe ne manque pas d'intriguer les passants en faisant circuler la rumeur d'un événement incontournable.
La compagnie présente également un spectacle explosif : Toro del Fuego. Ces mêmes Schteumits paradent autour « del señor » Alfonso, un taureau cracheur de feu. Dans cette corrida urbaine, cette bête de métal et de carton affronte ses toréadors dans l'arène (symbolisée par un cercle de spectateurs), le tout dans un déluge d'effets pyrotechniques. Ce spectacle se termine comme dans la réalité par l'effondrement du « toro » métallique.
Enfin, les spectateurs ont droit également à L'enfer des Phalènes, spectacle faisant partie de La Saga. Ce spectacle, modulable en fonction du lieu et des évènements, utilise des personnages déjà rencontrés lors des 22 épisodes précédents, en des temps des lieux et des humeurs différentes. Ce spectacle, véritable explosion de sons et d'images qui transfigure le port de Camfrout, est une révélation pour l'équipe de La Tête et les Mains. Après ce spectacle, elle ressent alors la nécessité d'une « pause » et décide que la prochaine manifestation sera entièrement dédiée aux arts de la rue.
Durant l'année 1988, l'équipe du PLRK multiplie les rencontres avec Oposito afin de monter ce projet de festival. Bien qu'a priori éloignés, cette association socioculturelle menée par des bénévoles et cette compagnie de professionnels d'arts de la rue se rejoignent sur le même objectif : bouleverser le quotidien des habitants. Ils proposent donc un concept original, en créant un véritable jour férié consacré à la folie au moyen des arts de la rue. Cette journée devra réveiller leurs « Grains de Folie », d'où le nom du festival.
Les textes de ce site sont extraits du mémoire de Mélanie Tanneau,
"Grains de Folie, Genèse du Fourneau et des Arts de la Rue dans la région brestoise" -
Plus d'infos...